400 000 Tablettes numériques en PACA : Une dotation régionale qui bafoue la liberté pédagogique et va à l’encontre d’un développement durable
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Pour la prochaine rentrée, pour accompagner la réforme du lycée, la Région a proposé aux établissements de choisir entre l’achat de « manuels papier » ou de « manuels numériques ».
Néanmoins, l’acquisition de licences pour manuels numériques est indissociable avec l’ambition politique de la Région d’offrir à tous les lycéens (et aux professeurs) une tablette type Android sur les 5 prochaines années, soit plus de 400 000 tablettes pour 22 millions d’euros (!) si l’ensemble des établissements vote en faveur de cette dotation en remplacement de tous manuels scolaires papiers.
A l’heure où notre jeunesse marche pour le climat dans toute la France, la Région PACA se targue de vouloir être la première région française à passer l’éducation au « tout numérique » avant même de considérer l’avis des enseignants.
Il s’avère que dans plusieurs établissements, une majorité d’enseignants se sont positionnés contre cette dotation tablettes en s’appuyant sur des expériences non concluantes déjà mises en œuvre dans différents collèges.
Très loin d’être réfractaires au « progrès » et à l’innovation dont ils font déjà preuve dans leur classe, ils ont mis en avant des arguments partisans d’écologie et d’économie d’argent public, voire de santé pour des élèves qui auront à passer la majorité de leur journée sur un écran.
De plus, ils ont aussi démontré que leur gestion de classe et de progression pédagogique allait s’en trouver réellement modifiée voire dégradée. Ils ont émis des réserves prononcées sur le fait que les élèves pourraient perdre, casser ou se faire voler cette tablette, ce qui finalement revient à la perte de tous les manuels scolaires
sans qu’on puisse obliger l’élève à racheter une tablette.
Ils ont aussi dénoncé le fait de devoir gérer la charge de ces appareils en classe. De plus, même si le « Wifi » de l’établissement est bridé, ils devront surveiller davantage des élèves qui utiliseront leur tablette à des fins non pédagogiques voire contourneront facilement les interdits (VPN...).
Sans parler des choix et mises à jour des applications si les élèves viennent finalement avec des tablettes de marques différentes avec des systèmes différents Android et Apple...
Pourtant, les professeurs ne sont pas écoutés dans leur choix pédagogique même dans des lycées ayant un label éco-responsable. En effet, certains chefs d’établissement subiraient « des pressions » de la Région. Certains auraient ainsi acté la dotation sans consultation des personnels, d’autres l’ont fait via un avis au CA qui fait obligatoirement office de décision (!).
L’administration, des représentants de la Région, des parents et des élèves
ont donc finalement décidé d’un outil pédagogique qui sera utilisé par les professeurs.
Or ces décisions bafouent la liberté pédagogique inscrite dans la loi de 2005.
Légalement, même le conseil pédagogique comme défini par l’article L421-5 ne peut porter atteinte à cette liberté.
Ainsi, le Conseil d’Etat l’a rappelé plusieurs fois : l’Etat définit les contenus d’enseignement et les missions des enseignants.
Aussi la liberté pédagogique reste-t-elle celle du choix des méthodes pédagogiques, des démarches didactiques et du type de médiations.
Ce principe a toujours été revendiqué comme garantie d’une indépendance de l’école face aux pressions partisanes et celle du respect des règles de la laïcité.
Mais c’est aussi un moyen pour l’enseignant de faire « respecter la spécificité et l’autonomie de sa pratique professionnelle » vis-à-vis de la hiérarchie administrative et des familles.
Nous, syndicats, demandons :
- Le respect de la liberté pédagogique de chaque enseignant
- L’annulation de toutes les décisions arbitraires ou « actées » en CA sur ce sujet
- La dissociation du choix des manuels numériques de la dotation des tablettes
- La consultation exclusive des enseignants au sein des établissements sur le sujet : manuel papier, manuel numérique ou les 2 (lot de manuels stockés en classe et licence pour la maison comme dans plusieurs collèges « sans livres » pour les élèves).
- Une dotation tablettes « établissement » pour les professeurs qui souhaitent les utiliser, solution pour économiser l’argent public et limiter l’impact environnemental.
Malgré tout, si la Région poursuit sa volonté d’offrir une tablette à tous les lycéens, elle doit assumer seule ce choix et ne doit pas rechercher la caution des enseignants en bafouant finalement leur liberté pédagogique pour ce qui reste une décision partisane et politique et non strictement éducative.
SUD EDUCATION 06 / SUD EDUCATION 83 / SUD EDUCATION 84 / SUD EDUCATION 04
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